Il était une fois, Stanoze
1923 / 1924, des bateaux arrivent à Marseille.
A bord, il y a quelques Arméniens qui sont parvenus à s’échapper d’une mort certaine. Apatride et par conséquent sans retour possible, ils seront placés dans des camps à Marseille pendant un certain temps.
Parmi ces personnes, mes arrières grand parents paternel et maternel avec leurs enfants, issus d’un petit village de l’empire ottoman, à une trentaine de kilomètres d’Ankara.
Ce village s’appelait Stanoze ou encore Istanos.
Aujourd’hui, le 03/11/2013, il est temps pour moi de me rendre sur la terre de mes ancêtres.
Départ le matin en gare d’Ankara avec pour destination Sincan. 30 minutes plus tard, nous arrivons.
Les seuls éléments que nous avons sont :
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Le village à été rasé et il n’y a plus rien,
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Il se trouve au sud d’une ville appelée Yenikant et le lieux s’appelle désormais Zir,
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Il y avait un pont, une rivière et des troglodytes.
Google map nous facilitera la tâche afin d’affiner le lieu que nous cherchons.
Nous souhaitons faire une boucle afin de ne pas passer 2 fois au même endroit et commençons à marcher directement depuis Sincan en direction de Yenikent.
Nous arrivons au milieu de nulle part et passerons un poste de sécurité avant de continuer notre marche dans un petit village en longeant la voie ferrée.
Quelques photos plus loin mais également quelques mètres plus loin, le chemin semble s’arrêter. Un vigile arrive en voiture. Il ne parle pas Anglais et il téléphone à un collègue. Nous souhaitons aller à un lac afin de pic niquer, mais ils ne souhaitent pas que nous nous y rendions. “No Exit”, “No lake” etc… Un dialogue de sourd s’installe pendant près d’une heure. Sur notre carte, un lac est bien présent, mais ils nous disent qu’il n’existe pas. Ensuite ils nous proposent de nous y accompagner. Bref ce comportement nous semble suspect…
Ils finirons par nous escorter à une station de minibus un peu avant Yenikent. Nous comprenons que nous ne sommes pas libre de nous rendre où bon nous semble et nous changeons nos plans. Nous ferons un aller retour à Stanoze sans faire de boucle.
Le chemin est entouré de terrain militaire et nous commençons à douter de la possibilité de nous rendre là bas jusqu’à ce que nous tombions sur une route au sud de la d140 qui part dans la bonne direction.
Nous continuons notre marche sur cette route jusqu’à ce que nous tombions sur une rivière et un pont.
Nous sommes dans la bonne direction, mais un sentiment étrange se fait sentir. Il n’y a personne, vraiment rien et pourtant nous ne sommes pas tranquille. Peut-être est-ce la mésaventure des gardes, peut-être les chasseurs au loin dans la montagne, ou tout simplement l’atmosphère et l’histoire de ce lieu.
Nous décidons de prendre un chemin plutôt que le bitume pour l’aller.
Pensant que nous sommes peut être arrivé, nous déjeunons au bord de la rivière.
Après manger, nous continuons un peu le chemin jusqu’à ce qu’il s’arrête.
Nous devons descendre et traverser la rivière. Un vieux monsieur en contre bas nous indique que nous pouvons passer.
Nous allons à sa rencontre et il nous invitera à manger. Nous ne pouvons pas refuser cette hospitalité malgré que nous n’ayons pas faim. Il nous confirmera que nous sommes à Zir et que ce lieu s’appelait Stanoze auparavant. La mission est donc accomplie, d’autant plus que nous apercevons les troglodytes un peu plus haut.
Le sentiment est vraiment particulier et indescriptible.
Certains ont marché sur la Lune, moi j’ai marché sur Stanoze, et ce grâce à ma famille et tout ce qu’ils ont accompli pour que j’ai la chance d’avoir cette vie.
Merci.
Super émouvant ton article et très heureux pour toi que tu es pu te rendre sur la terre de tes ancêtres…surtout que ça ne semblait pas gagner d’avance.
Nous sommes tous les deux très fier de toi…et je penses que nous ne sommes pas les seuls !
Biz
Isa et Romain
Beaucoup d’émotions… Merci, de les partager avec nous !
Très émouvant. BRAVO pour avoir eu le cran d’être allé fouler le sol de nos ancêtres. J’espère que tu n’y as pas vu de fantômes …
mince, d’être aller
Même devant tes réflexions et les photos, j’ai eu ce sentiment étrange et indescriptible
Merci en tout cas d’avoir recréé ce lien avec notre histoire…
STANOZE EN SURSIS
Y’avait un ptit bled, là-bas en Turquie,
Où turcs et arméniens vivaient en harmonie,
Dpuis longtemps, mais pas dpuis l’éternité
C’tait pas un conte de fée, c’tait la réalité.
Et puis un jour les ordres sont venus
Des arméniens, guiavours, on n’en veut plus
Certains turcs les ont cachés, et d’autres dénoncés
Les massacres ont démarré, continué, continué, continué …
Le sang a coulé, les hommes torturés devant les femmes violées
La haine, la peur, et les marches forcées
Dans le désert de Der-es-Zor jusqu’à l’épuisement
Le massacre des arméniens, quel boniment !
Pendant 3 ans, la tragédie a continué
Cachés, traqués, la fuite a été rude,
« Sans retour possible », les papiers estampillés
L’exil, la France, ce fut le début de la quiétude.
Et là-bas, Stanoze mutilée
Peu à peu a sombré dans l’oubli
Son nom est aujourd’hui effacé,
Mais Stanoze vit dans mes pensées.
Bonjour Noëlle,
Ce texte est très poignant, on ressent très bien l’atrocité et la douleur de cette triste réalité.
J’ai l’espoir qu’un jour cette réalité soit assumée et enseignée
Merci encore d’avoir fait partagé cet écrit.
Sébastien
Bonjour à Georges également
Commentaire du 14 novembre, à 18h26 : pardon, j’étais émue ; la bonne orthographe est celle du commentaire posté à 18h25
beaucoup d’émotions dans ce billet, il n’est pas besoin d’en rajouter, espérons que cette tragédie soit enfin reconnue un jour par tous, si le devoir de mémoire a encore un sens (ce qui n’est pas évident chez certains « dirigeants »…). Bravo pour ce que vous faites et bon courage à vous deux.
Guytounetbreizh
Il est loin ce village mais si présent dans les cœurs, Tous ceux qui ont vécu dans ce lieu , là ils sont maintenant, doivent être heureux de voir deux hommes leur redonner un peu d’humanité. Bonne route à tous les deux.
Une amie de Noëlle.
QUELLE EMOTION…
MERCI Raffi de faire partager cette aventure à la recherche de notre passé qui s’inscrit pourtant tellement dans le présent malgré la rupture.
Vous êtes courageux et tu peux être fier d’avoir accompli ce périple, pour toi, la famille, les générations à venir…
Bonne route à tous les deux.
Seb
Je suis un turc qui habite à Ankara, et je suis vraiment touché par ton périple, je lis souvent sur notre ancien pays, et nos anciens peuples qui nous manquent beaucoup… Ces terres ont perdu beaucoup de richesses à cause de ces massacres et déportations… On ne peut toujours pas trouver la bonne direction, les villes sont moches, sans intérêt, l’Anatolie est condamné à cause de la perte de ses peuples…
Bonjour,
Merci pour ce reportage.
Je suis stanotsi et très touchée.
Savez-vous qu’il existait tout près un lieu qui s’appelait GRASKAR.
Mon grand père parternel s’appelait HATCHADOURIAN Bédros et avait sa ferme à Graskar.
Mon grand père maternel s’appelait ICHKANIAN Istepan, dit marazadji.
Qui êtes-vous ?
cordialement.
ANNICK
Bonjour Nicolas, je suis à la recherche du livre d’Alice Odian-Kasparian « Histoire des Arméniens d’Angora et de Stanoz » impossible de le trouver je voudrai l’offrir à ma famille, pouvez-vous m’aider. merci
Bonjour Raffi,
je fais depuis plusieurs années des recherches sur ma famille qui est originaire d’Angora.
on m’a récemment fait suivre le lien de ton blog et je serai heureux d’échanger plus avec toi.
un grand merci pour les images d’Ankara et celles si émouvantes des traces Stanoz.
je lis actuellement le livre d’Alice Odian-Kasparian : « Histoire des Arméniens d’Angora et de Stanoz »
D’après son témoignage, Istanoz aurait compté 6000 habitants tous arméniens.
Cordialement
Nicolas Cambourian
Ma Mère était de Stanoz, ma grand-mère était veuve et devait pour nourrir ses trois enfants continuer l’exploitation des vignes toute seule. Elle partait à pied à Ankara vendre son vin ? ou son raisin 30kms en laissant ses enfants seuls qui se tenaient mutuellement groupés de peur en attendant leur mère.
Ma mère n’a pas pu aller à l’école, elle a aimé mais très vite on l’a retiré sous prétexte que des orphelins ne pouvaient pas avoir accès à l’instruction car ils devaient travailler pour survivre, elle a beaucoup pleuré et toute sa vie elle s’est sentie diminuée, je lui ai appris quelques lettres mais si tard qu’elle ne pouvait pas bien suivre, elle était déjà très fière de pouvoir signer les documents qu’on lui présentait à la place d’une x.
Je vais lire le livre d’Alice Odian-Kasparian, à Issy les Moulineaux et il y a eu même un livre sur tous les stanozssi.
Ils sont arrivés à Marseille comme la plupart et nous sommes les dignes représentants de ces Arméniens qui ont souffert, certes, mais qui ont réussi et très fiers de l’être.
J’ai créé une fondation avec mon fils pour l’enseignement bilingue franco-arménien car nous cherchons à créer une école d’excellence pédagogique afin que notre langue soit écrite et parlée par tous nos petits-enfants arméniens (vaste projet mais de sérieux pédagogues nous soutiennent) et nous voulons aider toutes nos écoles même hebdomadaires d’Arménien.
Vous pensez que votre article m’a séduite.
Cordialement,
Salut Raffi, aurais tu les coordonnées GPS de Stanoz. Ou amors un lien sur Google Map. je viens de Charvieu/Pont de Cheruy, tous les aréméniens d’ici viennnent de Stanoz. On m’a toujours dit la meme chose : qu’il n’y a plus rien.
39° 58′ 18.04″ N 32° 30′ 14.00″ E
http://www.panoramio.com/user/1346054/tags/Zir%20Vadisi
Merci Raffi! Je vais faire passer
Date: Wed, 14 Oct 2015 13:41:37 +0000 To: stefaniekowalski@hotmail.com
Bonjour Raffi, Je fais toute une recherche sur l’Arménie entre autre Stanoz là ou est née sa maman et ses frères dont un est mon beau-père tous décédés vu leur grand âge. Cette famille s’appelait KABAK KERAN OGLOU ou KABAKKERANIAN Arthur, Suzanne et Jean si vous avez des éléments sur cette famille je suis preneuse, je ne connais pas l’Arménie mais baigne dedans depuis mon mariage donc 44 ans dans qq jours. Ce sont des gens d’une grande culture et qui donne beaucoup. Je vous laisse mes coordonnées ci-dessous, merci pour toutes ces vidéos et ces photos. Sylvie
Bonsoir Raffi, j’ai lu ton reportage avant une grande émotion. Mes grands parents étaient de Charvieu dans l’Isère et j’ai souvent entendu parlé de Stanoz, leur ville d’origine. J’ai pu enfin découvrir les paysages de cet endroit. J’espère m’y rendre l’année prochaine avec mes cousins. Merci